PÈRE HUGUES GUINOT, POUVEZ-VOUS BRIÈVEMENT VOUS PRÉSENTER ?
P. Hugues Guinot : Je suis né à Auxerre (Yonne), le 3 mai 1958, deuxième d’une fratrie de six enfants. J’ai été ordonné prêtre le 23 juin 1985 pour le diocèse de Sens-Auxerre, après avoir suivi un premier cycle de séminaire à Dijon, puis la suite au Séminaire des Carmes (Institut Catholique de Paris).
REVENONS UN INSTANT SUR VOTRE PARCOURS VOCATIONNEL, QU'EST-CE QUI VOUS A CONDUIT À DEVENIR PRÊTRE ?
P. HG : C’est le Christ, bien sûr ! Ma vocation et mon cursus personnels ayant par ailleurs été fortement marqués par l’éducation populaire et la vie associative (scoutisme, colonies de vacances), dans lesquels étaient investis des prêtres, aumôniers ou directeurs de centres de vacances et de loisirs, qui ont pour moi été de vraies figures de pasteurs. Dans ce cadre, étant plus jeune, l’expérience de la randonnée en montagne et la vie en groupe en plein-air ont probablement été décisifs.
VOUS AVEZ ÉTÉ PENDANT NEUF ANS PÈRE AU CONSEIL DU SÉMINAIRE NOTRE-DAME DE L'ESPÉRANCE, POUVEZ-VOUS NOUS ÉCLAIRER EN QUOI CONSISTE LE RÔLE DE PRÊTRE FORMATEUR AU SÉMINAIRE ?
P. HG : Le plus important dans les responsabilités de formateur de séminaire, c’est l’accompagnement de la progression des séminaristes, à tous les niveaux : humain, spirituel, intellectuel (tutorat notamment), pastoral, et dans la vie communautaire. Tout cela suppose, sans entrer dans le détail, des compétences spécifiques pour lesquels les formateurs sont eux-mêmes formés.
Un formateur de séminaire doit particulièrement être attaché à son Église, fidèle à sa vocation, et doit essayer de montrer un bon exemple. Et il faut être soi-même, ne pas jouer artificiellement un personnage. C’est vrai pour tout prêtre, mais ça l’est d’autant plus fortement lorsqu’il est formateur de futurs prêtres. L’attention personnelle à chaque séminariste est fondamentale, en étant à l’écoute, rassurant lorsqu’il le faut, aidant tel ou tel à progresser dans sa vocation, parfois à modifier son orientation de départ. Ce qui veut dire être pour chacun à l’écoute de l’Esprit, car il n’existe jamais deux trajectoires identiques.
LORS DU RÉCENT « RASSEMBLEMENT DES SÉMINARISTES DE FRANCE » À PARIS EN DÉCEMBRE DERNIER, NOUS AVONS VÉCU UN MOMENT FORT QUI TÉMOIGNE DE LA VITALITÉ DES SÉMINARISTES. EN TANT QUE PRÊTRE FORMATEUR, QUEL EST VOTRE REGARD SUR LA FORMATION ACTUELLE AU SÉMINAIRE ET SUR LES DÉFIS AUXQUELS LES SÉMINARISTES FONT FACE AUJOURD'HUI ?
P. HG : Je réponds en termes d’enjeux. Un premier enjeu, celui de la diversité culturelle croissante dans la communauté du séminaire, mais aussi dans nos paroisses. C’est un vrai défi à relever, par ailleurs passionnant. Autre enjeu, la formation doit aider chacun à bien se connaître lui-même, dans un monde aux innombrables sollicitations de toutes sortes.
Autre enjeu encore, développer une vision plurielle de l’évangélisation et de la mission, car dans une société où la pratique religieuse et la culture chrétienne ont reculé, le témoignage de foi est plus important que les méthodes pastorales, fussent-elles bonnes, car si le témoignage s’exprimait toujours sur les mêmes modes, il ne pourrait pas rejoindre toutes les « périphéries ». Autre enjeu enfin (j’en oublie sûrement), la crédibilité de notre attachement au Christ passe par une formation philosophique et théologique solide pour tous, même si tous ne sont pas d’abord des intellectuels.
QUELS CONSEILS DONNERIEZ-VOUS AUX FUTURS PRÊTRES QUI SE PRÉPARENT À ENTRER DANS LE MINISTÈRE SACERDOTAL ?
P. HG : Ce qui me vient à l’esprit, c’est : garder de vrais amis, pas nécessairement chrétiens pratiquants, et leur être fidèle ; garder si possible des liens avec sa famille ; avoir un accompagnateur spirituel, surtout dans les premières années de ministère ; autant que faire se peut, avoir une équipe de vie composée de quelques prêtres ; aimer les gens en général et le presbyterium en particulier… et écouter la sagesse des anciens, liée à leur expérience ; demeurer fidèle à la liturgie des heures, quitte à tâtonner un peu au début (l’office célébré seul y oblige) ; prendre un engagement dans la société, dans un esprit de gratuité (vie associative par exemple), sans pour autant se laisser manger… ; lire régulièrement ; s’octroyer quelques loisirs, qui obligent à bouger physiquement. Tenir tout cela est une question d’équilibre de vie sous le regard du Seigneur, donc de discipline et d’exigence personnelles.
COMMENT ENVISAGEZ-VOUS VOTRE TRANSITION HORS DU SÉMINAIRE ET VERS UN NOUVEAU CHAPITRE DE VOTRE MINISTÈRE ?P. HG : Mon mandat actuel de trois ans au séminaire, à deux tiers de temps, devait s’arrêter, c’était prévu, et j’y étais donc prêt, même si le séminaire me manquera. L’avenir est encore plein d’incertitudes, notamment parce que, comme official, les dossiers à traiter (nullités de mariages surtout) sont complexes, spirituellement et humainement éprouvants. Mais j’avance en confiance, espérant tirer du séminaire le bénéfice du travail en équipe auquel je crois très fort, pour que cela déteigne sur ma future mission !
DEPUIS QUATRE ANS, VOUS ÊTES AUMÔNIER NATIONAL DU RÉSEAU SANTÉ DES SCOUTS ET GUIDES DE FRANCE, AYANT REÇU QUATRE BÛCHETTES, LA SPIRALE DE L' AMGE, AINSI QUE LA MÉDAILLE D'ARGENT DE LA JEUNESSE, DES SPORTS ET DE L'ENGAGEMENT ASSOCIATIF EN 2021, VOUS SUSCITEZ L'ADMIRATION DANS LE MILIEU DU SCOUTISME. POURQUOI AVEZ-VOUS ÉTÉ ATTIRÉ PAR LE SCOUTISME ET QU'EST-CE QUI VOUS MOTIVE À RESTER ENGAGÉ DANS CE MOUVEMENT ?
P. HG : Mais comment savez-vous tout cela ? Je ne sais pas si je suscite l’admiration… je ne suis pas le mieux placé pour en juger. En réalité, cette histoire remonte à mon enfance (j’ai été inscrit comme louveteau à l’âge de sept ans et cela ne m’a jamais quitté). Dans le scoutisme et plus largement dans l’éducation populaire, mes formateurs ont très tôt déniché chez le jeune adulte que je fus des capacités à devenir directeur et formateur moi-même. En volume, l’activité de formation aura été, dans ces milieux, le plus fort de mon investissement. Aujourd’hui encore, on me demande de continuer à participer à la formation des cadres du scoutisme. Je forme parfois des jeunes chefs, animateurs, mais surtout aujourd’hui ceux qui dirigent le mouvement aux niveaux local, régional, national, parfois en contexte international. J’ai moi-même eu la chance de vivre le cursus de formation scoute dans sa totalité (d’où les quatre « bûchettes » !). Pour être complet, je suis titulaire du BAFD depuis mars 1983, et j'ai été membre d’un jury BAFA pendant dix ans.
NOS LECTEURS NE LE SAVENT PEUT-ÊTRE PAS MAIS VOUS AVEZ UNE PASSION POUR LES GRENOUILLES, POUVEZ-VOUS NOUS DIRE POURQUOI UNE TELLE FASCINATION POUR LES GRENOUILLES ?
P. HG : Le mot « fascination » est un peu excessif… Un jour, lorsque j’étais directeur de colo, j’ai raconté une histoire de grenouille au cours d’une veillée… Cela a tellement plu qu’on me l’a très souvent redemandée. Un peu plus tard, avec quelques scouts un peu plus motivés que les autres, ceux dont on devine assez facilement qu’ils pourront être de futurs chefs (ceux qui sont nés avec un foulard autour du cou), j’ai inventé une activité que j’ai appelée « La Patrouille des Grenouilles ». Ce serait trop long à raconter ici…
PÈRE HUGUES GUINOT, VOUS ÊTES UN FRIAND DE JEUX DE MOTS ET NOUS NE POUVONS PAS CONCLURE CET ENTRETIEN SANS VOUS DEMANDER UNE PETITE BLAGUE OU UNE DEVINETTE QUI A RETENU VOTRE ATTENTION RÉCEMMENT ?
P. HG : Je me suis rendu compte récemment, donc tardivement, que la sacristie du séminaire n’est pas une vraie sacristie : il n’y a pas de panier pour la quête !
Propos recueillis par Vincent Thomas